Image: ‘Death of the conceptual artist Ilya Kabakov’
Ilya and Emilia Kabakov in their studio. Photo: Yuri Rost
Featured in Le Monde

‘Death of the conceptual artist Ilya Kabakov’ Obituary by Phillipe Dagen

29 May 2023

La mort de l’artiste conceptuel Ilya Kabakov

Après une carrière de graphiste et d’illustrateur durant la période soviétique, l’artiste a développé avec sa femme, Emilia, aux Etats-Unis, des installations de plus en plus complexes, célébrées dans le monde entier. Il est décédé le 27 mai, à l’âge de 89 ans.


Par Philippe Dagen


Dessinateur, peintre, écrivain, concepteur d’installations, figure très respectée de l’art contemporain, Ilya Kabakov est mort le 27 mai chez lui, à Long Island, aux Etats-Unis, à l’âge de 89 ans, paisiblement et entouré des siens, selon le communiqué diffusé par sa famille.

 

Ilya Iossifovitch Kabakov naît dans une famille juive le 30 septembre 1933 à Dniepropetrovsk (aujourd’hui Dnipro), alors ville de la République socialiste d’Ukraine. Il survit à la seconde guerre mondiale parce qu’il est évacué avec sa mère avant l’arrivée des armées nazies en Ukraine, jusqu’à Samarcande, en Ouzbékistan.

Après la guerre, il étudie les arts à Moscou et obtient en 1957 un diplôme en graphisme et illustration à l’Institut d’Etat des beaux-arts Sourikov. S’étant spécialisé dans les livres illustrés, devenu membre de l’officielle Union des artistes soviétiques, il n’a alors rien d’un dissident et ne montre pas ses « dessins pour [s]oi-même » avant les années 1960. Mais, en 1965, il participe à une exposition d’artistes soviétiques à L’Aquila, en Italie, organisée par le Parti communiste italien. Il y montre une série de dessins au sujet inattendu : la douche. Une douche dont l’eau ne coule jamais et sous laquelle un homme attend, en vain… Cette allégorie de la frustration lui vaut d’être quelque temps privé de travail. Rétrospectivement, il apparaît qu’elle contient en puissance l’œuvre à venir.

Dans la seconde moitié de la décennie, tout en préservant les apparences d’un conformisme plus prudent, il devient l’un des membres du groupe dit « du boulevard de Sretensky », dont font aussi partie Erik Boulatov et Eduard Steinberg. Kabakov exécute alors ses premières peintures, la « série russe », dans laquelle les objets figurés apparaissent à peine sous le brun qui les recouvre symboliquement comme l’ordre soviétique étouffe toute création non conforme à son système, y compris en matière artistique.

 (...)

Au fil du temps, la thématique soviétique tend à céder la place à un symbolisme plus général et les créations deviennent de plus en plus vastes et spectaculaires, jusqu’à L’Etrange Cité qui, en 2014, dans le cadre du cycle Monumenta, occupe la nef du Grand Palais, à Paris. Ilya Kabakov nous disait alors, lors d’une visite de ses ateliers de Long Island : ‘Ce que je souhaite, c’est que le visiteur soit pris comme dans un labyrinthe, qu’il aille et vienne, qu’il s’arrête, qu’il prenne le temps de la contemplation et de la réflexion.’

La reconnaissance de ce style a été remarquablement rapide. Dès la fin des années 1980, alors que l’URSS s’effondre, les Kabakov sont invités à exposer en Europe (Allemagne, France, Pays-Bas) puis, à partir de 1991, aux Etats-Unis. En 1993, leur installation Le Pavillon rouge occupe le pavillon de la Fédération de Russie à la Biennale de Venise. Cette même année, ils sont au Stedelijk Museum d’Amsterdam, en 1995 au Centre Pompidou et au Garage, à Moscou, en 2008. Une rétrospective de leur œuvre doit ouvrir à Tel-Aviv en juillet, et une exposition au Centre Pompidou en 2024. 

 Philippe Dagen
Atmospheric image Atmospheric image
Atmospheric image Atmospheric image
Atmospheric image Atmospheric image